Éditorial

Auteur(e)

Françoise Genest

Journaliste de carrière, Françoise Genest a également été cadre dans différents médias et auteure de guides pratiques. Elle est aujourd'hui rédactrice en chef d'avenues.ca.

Non au carré noir! Optons pour le carré rose et bleu!

Le tsunami social qui a déboulé depuis la création du hashtag #moiaussi a bouleversé tout le Québec. Dénonciations, confessions, condamnations, prise de conscience, ce raz-de-marée changera sans doute quelque chose dans le tissu social québécois. Souhaitons que ce soit pour le meilleur.

Les réseaux sociaux ne dérougissent toujours pas sur le sujet et affichent aussi le pire. Et dans la foulée de toutes ces réactions, souvent pavées de bonnes intentions, l'apparition d'une idée, celle d'un carré noir à mettre en lieu et place de la photo de profil sur les réseaux. Une façon qu'auraient les femmes de démontrer aux hommes ce qui arriverait, si elles disparaissaient.

Je n'aime pas cette idée. Ni la notion de disparition à l'heure même où la parole se libère enfin et que les femmes osent lever le voile. Mais surtout je n'aime pas le "montrer aux hommes". Comme si tous les hommes étaient des abuseurs.

Je pense qu'il était temps que tous les hommes entendent la détresse et le ras-le-bol des femmes. Je pense aussi qu'il était temps qu'on entende la voix d'hommes, eux aussi victimes d'agressions, même s'ils sont beaucoup moins nombreux que les femmes, lorsqu'il est question, non pas de pédophilie, mais d'abus envers des adultes.

Je dis non au carré noir



Je dis non au carré noir. Je dis non au black-out des femmes. Je dis non au clivage femmes/hommes. L'idée même d'un carré qui masque l'identité ne me paraît pas des plus intéressantes. Mais si je dois afficher ou porter un carré, il ne sera certainement pas noir et n'aura pas pour but de disparaître aux yeux des hommes. Si je devais arborer un carré, il serait rose et bleu, parce que je souhaite que les hommes, qui ne sont pas tous des salauds, bien au contraire, marchent à nos côtés pour en finir avec les comportements de mononcle cochon, d'abuseurs, d'agresseurs et de prédateurs.

Pour que les femmes se tiennent droites et disent NON aux blagues et aux remarques sexuelles déplacées, aux gestes inappropriées, aux pressions à caractère sexuel, subtiles ou non et aux agressions en tout genre. Et que les hommes se lèvent, eux aussi, pour dénoncer et refuser ces comportements.
Un carré rose et bleu pour que les femmes abusées et aussi les hommes dans certains cas, puissent être entendus.

Un carré rose et bleu qui dit que les hommes, tout aussi bien que les femmes, disent NON ça suffit!!

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Un carré rose et bleu pour que les hommes ne soient pas tous jugés comme des prédateurs, pour que le féminisme englobe aussi les hommes qui croient que les femmes ont droit à l'égalité, la sécurité et le respect  et qu'ils se sentent inclus. Et je sais qu'ils sont nombreux.

Une partie bleue pour que les hommes ne rient plus aux blagues déplacées et soient capables de voir le malaise qu'elles provoquent souvent chez les femmes présentes. Une partie bleue pour que les hommes refusent que certains hommes les fassent tous passer pour des salauds.

Une moitié bleue pour que les pères, les frères, les amoureux des femmes puissent être solidaires et se tenir debout pour elles.

Un appel à mes chums de gars

Un carré rose et bleu pour dire que l'abus, tous sexes confondus, n'est pas acceptable, ne sera plus toléré ni par les femmes ni par les hommes. C'est un appel à tous mes chums de gars, à mes collègues masculins, aux hommes bien qui sont dans ma vie, une main tendue pour qu'ils marchent aux côtés des femmes de leur vie.

Je voudrais que #moiaussi ne débouche pas seulement sur une prise de parole et de position des femmes et des hommes abusés, je voudrais que cela débouche sur une prise de position de cette majorité d'hommes, qui ne sont pas des abuseurs, et que cela les incitent à agir, à parler, à refuser d'être les complices silencieux de cette petite et grande violence quotidienne avec laquelle les femmes doivent composer.

Un carré rose et bleu pour que toute la responsabilité du changement de mentalité et de la dénonciation des abuseurs ne repose pas sur les seules épaules des femmes qui en sont les principales victimes.

J'ai traversé une longue carrière, vécu sous d'autres cieux et une autre culture, j'ai aimé, j'ai vécu avec et parmi les hommes. J'ai croisé des abuseurs, mais j'ai surtout connu des hommes bien et je leur offre de partager mon carré rose et bleu.

Y a-t-il preneur?

 

 

 

 

 

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Françoise Genest

Journaliste de carrière, Françoise Genest a également été cadre dans différents médias et auteure de guides pratiques. Elle est aujourd'hui rédactrice en chef d'avenues.ca.