La chronique Culture avec Claude Deschênes

Auteur(e)
Photo: Martine Doucet

Claude Deschênes

Claude Deschênes collabore à Avenues.ca depuis 2016. Journaliste depuis 1976, il a fait la majeure partie de sa carrière (1980-2013) à l’emploi de la Société Radio-Canada, où il a couvert la scène culturelle pour le Téléjournal et le Réseau de l’information (RDI). De 2014 à 2020, il a été le correspondant de l’émission Télématin de la chaîne de télévision publique française France 2.On lui doit également le livre Tous pour un Quartier des spectacles publié en 2018 aux Éditions La Presse.

Les Choristes: se révéler par la voix

Qui n’a pas aimé Les Choristes? Nous avons été nombreux à être touchés par ces jeunes garçons d’une école de réforme qui trouvent la rédemption dans le chant. En juin et juillet, Juste pour rire nous offre l’occasion de replonger dans cette histoire au Monument-National. Comme dans le film, les voix d’enfants et la musique de Bruno Coulais font fondre les cœurs.



En 2004, le réalisateur Christophe Barratier a frappé un grand coup avec sa revisite du film La cage aux rossignols (1945) de Jean Dréville: 8 millions d’entrées en France seulement, des nominations aux César et aux Oscars et un impact considérable sur la réhabilitation du chant choral en France. L’an dernier, il a décidé d’en faire une version pour la scène. Les personnages centraux sont toujours Clément Mathieu, le débonnaire surveillant de classe qui vient à bout de la turbulence des élèves par la musique; Rachin, l’horrible directeur de l’institution; Langlois, l’instituteur caméléon; Mongeau, le petit bum; Mme Morhange, la mère du «rossignol», et le coloré père Maxence. Sans oublier, bien sûr, les enfants et le chant. Ils sont 15 sur scène.

Photo: Ève Line Montagne
Photo: Ève Line Montagne

La production de Juste pour rire peut compter sur 30 jeunes garçons de la Maîtrise des Petits Chanteurs du Mont-Royal et de l’ensemble des Petits Chanteurs de Laval. Ils s’en tirent relativement bien dans le jeu, encore que ce soit difficile de croire qu’ils sont des durs à cuire, mais c’est surtout lorsqu’ils chantent qu’ils nous éblouissent. Ce sont des pros. La voix humaine en harmonie, quand ça repose sur autant de talent et de dévotion, ça fait des petits miracles.

Photo: Ève Line Montagne
Photo: Ève Line Montagne

La distribution compte de nombreux anciens de L’Auberge du chien noir. François L’Écuyer, Renaud Paradis, Gary Boudreault, Lynda Johnson insufflent à ce spectacle la même énergie qui a fait le succès de ce téléroman pendant 15 ans. Le mélange de simplicité, d’authenticité et d’humour qu’on y retrouve en fait un spectacle très familial, accessible à un large public.

Photo: Ève Line Montagne
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Dans l’adaptation scénique, la narration de l’histoire passe par Clément Mathieu. François L’Écuyer donne beaucoup d’humanité à ce personnage pas gâté par la vie, mais qui n’en donne pas moins aux autres par amour de la musique. Dans sa manière de rendre le caractère de Rachin risible, Henri Chassé, que je n’ai jamais vu dans un rôle de gros méchant, est super efficace. Quant à Gary Boudreault, il amène de la couleur avec son accent beauceron à couper au couteau.

Photo: Ève Line Montagne
Photo: Ève Line Montagne

Il faut savoir que dans l’adaptation québécoise qu’elle a faite de la version française du spectacle Les choristes, Maryse Warda a habilement transposé l’histoire dans la Beauce des années 1940.

Photo: Ève Line Montagne
Photo: Ève Line Montagne

Le metteur en scène, Serge Denoncourt, a la touche pour moduler ce genre de partition. Il sait quand souligner à gros traits pour aller chercher un rire ou la jouer piano pour créer une émotion. Les décors de Guillaume Lord, astucieusement pensés, donnent de la fluidité à l’enchaînement des scènes. Pierre-Guy Lapointe a aussi fait un formidable travail aux costumes.

Photo: Ève Line Montagne
Photo: Ève Line Montagne

Encore une fois, Juste pour rire Spectacles a mis les moyens pour que la reprise d’une œuvre importante du répertoire cinématographique soit, sur scène, à la hauteur de notre souvenir.

Photo: Ève Line Montagne
Photo: Ève Line Montagne

Cependant, il y a eu une ombre au tableau en ce jour de première que je ne peux passer sous silence. Les nouveaux propriétaires du groupe Juste Rire ont annoncé, quelques heures avant le lever du rideau, le congédiement des productrices du spectacle, Luce et Lucie Rozon, ainsi que celui de leurs sœurs Martine et Constance. Je ne connais pas les raisons de cette décision; j’espère que leur seule faute n’est pas d’avoir été les sœurs de leur frère. Ce serait vraiment indécent. Et que dire du timing de cette décision, sinon qu’il fait preuve d’un manque total de considération pour les artistes, parmi lesquels de nombreux enfants qui faisaient leurs débuts sur scène. Personne de cette équipe ne méritait d’être perturbé par une telle mauvaise nouvelle.

Photo: Ève Line Montagne
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