La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

De nouvelles bornes pour passer plus vite à la douane, vraiment?

De nouvelles bornes seront bientôt déployées dans tous les aéroports du pays pour remplacer la carte de déclaration E311. À YUL, 52 premières bornes ont été activées le 7 novembre et 48 autres le 5 décembre 2017. L’objectif: diminuer le temps d’attente à l’arrivée. Vraiment?



Au début de décembre, en revenant de l’Arizona, j’ai constaté que les bornes où j’avais l’habitude de scanner ma carte de déclaration, à l’étage des arrivées, juste avant d’emprunter l’escalier pour rejoindre les files d’attente, avaient été retirées. J’adorais ces bornes qui me permettaient de gagner du temps et, surtout, de prendre la file plus rapide une fois descendue aux douanes. Alors que tout le monde se plaignait de l’interminable attente à l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau l’année dernière, je n’ai jamais vécu de frustration – sauf quand mes bornes favorites étaient en panne –, même en voyageant en moyenne une fois par mois.

En m’approchant du début de la file, la déception fait place à de la surprise en constatant l’ajout de nouvelles bornes. Elles fonctionnaient pourtant très bien les anciennes, non? «Elles sont là depuis le début de novembre», me dit l’agente sur place.

Nouvelles bornes aux douanes Photo: Facebook Aéroport de Montréal
Nouvelles bornes aux douanes de l'aéroport. Photo: Facebook Aéroport Montréal-Trudeau

Je tape sur l’écran pour débuter. Rapidement, je réalise que les questions sont exactement les mêmes que celles sur la fiche remplie plus tôt dans l’avion. Je demande à un autre agent si j’ai la berlue. Non seulement c’est bel et bien le même document, mais bientôt, les fiches en papier disparaîtront complètement des avions, m’apprend-il. Impossible toutefois d’en savoir plus, les agents semblant eux-mêmes un peu confus. Chose certaine, pour le moment, il faut encore faire sa déclaration deux fois plutôt qu’une.

Une fois à la maison, je fais part de mon étonnement sur Twitter. Aéroports de Montréal me répond que tous les aéroports canadiens seront bientôt dotés de ce type de borne. «Ces bornes plus efficaces sont connectées à une application qui permet de remplir d’avance la déclaration sur mobile et de réduire le temps de traitement.» Ben voilà, il fallait le dire plus tôt!

Je vais bien sûr télécharger l’application sur-le-champ. S’il est nécessaire d’être connecté à Internet pour cette première étape, ensuite, il est possible de remplir la déclaration en mode avion, avant même d’atterrir, comme pour le formulaire en papier.

L'interface de la nouvelle application Photo: Site web de Agence des services frontaliers du Canada
L'interface de la nouvelle application. Photo: Site web de Agence des services frontaliers du Canada

L’application mobile se télécharge simplement. Dès la première étape, cependant, je sursaute: on me demande mon «surnom». Mauvaise traduction? En fouinant sur le site de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), je constate que ce n’est pas une erreur. On nous demande un surnom pour une question de confidentialité. N’empêche, l’idée d’un «surnom» continue de m’apparaître étrange dans un contexte de douanes.

Objectif: gagner du temps

Le département des communications d’Aéroports de Montréal me réfère à l’ASFC pour mieux comprendre comment on en est arrivé à croire que l’implantation de ce système parviendrait à nous faire gagner du temps. Véronique Lalime, conseillère en communications de la région du Québec de l’ASFC me confirme que l’agence souhaite éliminer la carte de déclaration dans les aéroports équipés de bornes d’inspection primaire. À Montréal, cet objectif devrait être atteint dès février 2018.

«Avec l’arrivée de bornes additionnelles dans la salle des arrivées (pour un total de 100 bornes), nous sommes confiants que les temps d’attente seront diminués, y compris lors des périodes de forte affluence, m’assure-t-elle après que je lui eus fait part de mon scepticisme. Notez aussi que 33 bornes additionnelles seront mises en services en février 2018 pour les vols de correspondance.»

Photo: Facebook Aéroport de Montréal
Photo: Facebook Aéroport Montréal-Trudeau

Les volumes annuels de voyageurs aériens à l’échelle mondiale continuent d’augmenter d’environ 3,5% selon la conseillère. «Cependant, dans les principaux aéroports canadiens, nous assistons à des augmentations de plus de 10 % chaque année. Les nouvelles bornes et la nouvelle application mobile aideront à simplifier le contrôle des passagers à leur arrivée. Le traitement à la borne permettra à l’ASFC de traiter un plus grand nombre de voyageurs à l’heure, ce qui devrait réduire la congestion et les temps d’attente dans les aéroports. Les voyageurs qui utiliseront l’application mobile de déclaration électronique pourraient voir le délai nécessaire à leur contrôle à la frontière réduit de moitié en se présentant à une borne.»

Quant au fameux surnom, rassurez-vous, il n’est pas utilisé lors des formalités frontalières. «Il sert seulement à gérer votre déclaration dans votre application, précise Véronique Lalime. Votre nom légal complet provient plutôt de votre passeport (ou autre document de voyage) lors de votre passage à la borne. Votre déclaration électronique est liée à votre identité légale lors de votre passage à la borne. Ceci a été fait pour limiter les risques d’erreur de transcription textuelle, limiter la collecte des données et protéger vos renseignements personnels.»

Et le respect de la vie privée?

Une photo est également prise lors du passage à la borne, étape qui rebute certains voyageurs soucieux de leur vie privée. Qu’adviendra-t-il de ces derniers, ainsi que des voyageurs moins à l’aise avec la technologie?

«On demande aux voyageurs qui arrivent aux aéroports munis de bornes de les utiliser, car cela nous permet d’offrir un meilleur service, répond Mme Lalime. Le traitement en personne auprès d’un agent des services frontaliers sera encore offert pour les personnes non admissibles ou qui ne peuvent pas utiliser une borne. La sécurité et la protection des renseignements personnels ont été prises en compte dans tous les éléments de la conception des bornes et de l’architecture des systèmes. Aucun renseignement personnel n’est entreposé dans la borne. Les seuls renseignements retenus sont sauvegardés de façon sécuritaire dans les systèmes de l’ASFC, conformément aux politiques du gouvernement relatives à l’information, à la protection des renseignements personnels et à la sécurité. Tous les voyageurs utilisant les bornes d’inspection primaire sont d’abord invités à lire et à accepter un énoncé de confidentialité. On prend votre photo à la borne pour confirmer votre identité et votre déclaration. Cette photo est comparée à celle qui figure sur votre document de voyage. Votre photo sera également imprimée sur le reçu de la borne afin que l’agent des services frontaliers puisse confirmer que vous avez fait une déclaration.»

Ceux qui souhaitent en savoir plus sur le sujet peuvent consulter un résumé de l’évaluation de l’ASFC des facteurs relatifs à la vie privée au Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.

Pour ma part, c’est surtout l’attente qui continue de me préoccuper. Je me demande vraiment comment remplir la carte de déclaration à l’arrivée plutôt que dans l’avion pourrait faire gagner du temps! J’espère avoir tort de m’inquiéter…

La déclaration électronique complétée avant l’atterrissage m’apparaît toutefois comme une bonne idée. Il reste maintenant à espérer que tous les avions soient dotés de prises pour recharger les téléphones, histoire de pouvoir remplir notre déclaration après avoir visionné des films sur l’application que demandent de télécharger de plus en plus de transporteurs aériens pour avoir accès au divertissement en vol…

Plus simple, voyager en 2017? Pas forcément.